[OS] Your inner Darkness

par **Olivia Lovegood** 14.04.21 16:54

Your inner Darkness❯❯ Décembre 1990 - Azkaban ❮❮You should have known the prize of evil but it hurts to know that you belong here. No one to call, everybody to fear, your tragic fate is getting so clear...Pluie battante se mêlant à l’iode, au sel qui recouvrait la surface de la roche abîmée, pourtant invincible grâce aux sortilèges qui sécurisait la prison des Sorciers. L’orage grondait au-dessus des mers, rappelant à ceux qui sommeillaient là qu’ils ne pourraient jamais trouver la quiétude et le repos entre ces murs. Il ne faisait jamais vraiment jour, le temps s’égrainant avec une lenteur qui semblait infinie, rendant les souffrances éternelles.

Elle grelotait. Recroquevillée contre le mur, de sa cellule, ses bras venant entourer ses genoux nus, elle cherchait à conserver sa propre chaleur. L’humidité de la cellule lui offrait une odeur pestilentielle, confort poisseux qui recouvrait sa chair d’une pellicule moite. Ses cheveux, autrefois blonds, teints soigneusement en roux dans sa fuite, n’étaient plus que paquets poussiéreux et graisseux. Vêtue d’une tunique en toile de jute, elle n’avait dès lors plus le moindre honneur à conserver, plus la moindre résistance à offrir. Mais l’apparence physique n’était que la partie émergée de l’iceberg. La violence psychologique d’un tel lieu était d’une violence incomparable.

Les cris. Les hurlements de terreur. De folie. Elle y avait mêlé sa voix, l’éraillant durement, l’attaquant dans sa clarté, frappant les barreaux de sa geôle avec une pierre, espérant attirer une attention que ses voisins n’avaient pu obtenir. Mais comme eux, elle n’eut pour seule réponse que le silence et la folie passagère de croire que le néant était un camarade à la compagnie agréable. Les moments les plus sombres, pourtant, demeuraient ceux où les Détraqueurs sillonnaient les couleurs, glissant au-dessus du sol, silhouettes fantomatiques qui apportaient la tristesse, la peine et le froid givrant dans leur sillage. Olivia avait appris à les craindre, à se faire plus petite encore quand ils s’approchaient des barreaux de sa cellule. A pleurer comme une enfant. Car c’était bien ce qu’elle était, une enfant. Punie par son père, écartée de la vie pour mieux retenir les leçons que son géniteur souhaitait lui enseigner, l’encre coulée sous la peau de sa nuque pour mieux offrir aux yeux de tous son insolence domptée. Combien de temps tout cela durerait-il ? Tu sais quoi faire pour sortir. Oh oui, elle savait. Mais elle se refusait cette simple idée. Elle se refusait cette seule possibilité. « Plutôt mourir qu’Ulixes… Plutôt mourir qu’Ulixes… » Se balançant d’avant en arrière, elle se répétait ce mantra, encore et encore, murmure entre les mures se ricochant sur les pierres gelées.

Et puis un jour, alors qu’elle chantonnait cette litanie afin de se redonner du courage, une voix grave lui arracha un hoquet de terreur. « Ulixes, hein ? Yaxley, je présume… » Cela semblait venir de la cellule aux côtés de la sienne. La douce enfant s’était figée, n’ayant pas la moindre idée de l’identité de celui qui lui servait de voisin. Tombant dans le silence, elle osait à peine respirer, serrant les dents. Avait-elle seulement rêvé cette voix ? Ou bien était-ce réel ? Il lui semblait perdre la tête autant qu’elle perdait pied… « Il faut pas croire tout ce qu’on lit dans les journaux, ma jolie… » C’était vrai. C’était réel. Il lui parlait. Se redressant un instant, elle se faufila à quatre pattes jusqu’aux barreaux de fer, un mur l’empêchant de voir l’interlocuteur. La gorge nouée, les dents serrées, ce fut d’une voix rauque qu’elle s’exprima. « C’est moi qui ai écrit ces articles. » Un rire. Un rire sadique, froid, qui pétrifia un peu plus Olivia, se fit entendre, menaçant de la faire battre en retraite, de retourner à l’opposé de sa place. Ses doigts crasseux bien que demeurant fragiles d’aspect se posèrent sur les barreaux, refermant sa poigne tandis qu’elle se penchait, espérant presque apercevoir le visage de son interlocuteur. « Alors tu es une de ces vipères de Lovegood… » Sifflant entre ses dents, la jeune femme marqua sa désapprobation face à ce qualificatif qui lui correspondait bien plus qu’elle n’aurait voulu. L’ancienne Serpentard renifla légèrement, se rappelant que, du serpent, elle avait bien plus que d’un autre animal. « Ce n’était pas si faux… Mais ça ne rend pas à moitié honneur aux véritables faits d’arme d’Ulixes. Vous n’avez pas été capables d’identifier bon nombre de ses crimes. » Un rire sarcastique échappa des lèvres d’Olivia. « C’est censé me rassurer ? Désolée, j’aurais dû mieux titrer mes articles en affichant ce salaud… » « Te rassurer ? Non, c’est censé te rappeler que tu as de la chance d’être en vie… »

Il semblait prendre plaisir à la torturer. Il semblait s’amuser de sa peur, de sa terreur. Mais il ignorait probablement tout du véritable revers du décor. Depuis combien de temps croupissait-il dans la geôle ? Trop pour être informé de l’annonce de ses noces avec le Yaxley. « Plus pour longtemps… » Et il rit, à nouveau. Il rit de sa faiblesse, de sa peur et de ce froid qui rongeait son corps jusqu’aux os.

A chaque jour sa peine. A chaque jour ses mots. Au fil des discussions, bien qu’ignorant toujours qui pouvait être son interlocuteur – bien qu’ayant forcément compris qu’il s’agissait d’un Mangemort – il essayait de lui remémorer certains crimes, certaines morts. Les jours ne semblaient alors pas assez sombres pour qu’il se permette de la renvoyer à l’angoisse de la guerre et ses monstruosités. Elle n’avait pas pris part aux batailles, traumatisée par la violence de l’attaque du Chemin de Traverse, se retrouvant en plein feux croisés. Et lui énumérait les noms qu’elle avait si soigneusement retranscrit dans la rubrique nécrologique, s’attribuant quelques mérites, taisant les autres meurtriers tout en sachant qui les avait tués. Des morts restés sans vengeance. Elle préférait fermer son esprit, protégeant sa santé mentale, se focalisant sur des choses positives ou des détails insignifiants de sa cellule. Jusqu’à ce que… « Ah, et les McGonagall, aussi… Je me souviens de la manière dont le frère a hurlé quand on a d’abord tué sa jumelle… C’était… » « Qui… Qui les a tué ? » Sa voix s’était élevée dans la nuit sans même qu’elle ne s’en rende compte. Une voix dans laquelle vibrait la colère et la rage. La voix de la vengeance. Fitz. Douce existence arrachée dans la douleur. Elle visualisait la scène, terrible, le frère impuissant devant le corps sans vie de sa gémellaire moitié. Et sa mort. L’éclair vert, fatal. Elle l’avait vu dans bien des cauchemars. Elle avait hurlé en se réveillant, frustrée de ne pas voir le visage de celui qui tenait la baguette.

Subitement revenue à la vie, elle se cramponna aux barreaux de sa cage. « Répond ! Qui ?! » Et il riait. Il riait de cette soif de vengeance qu’il sentait grandir en elle, coulant dans son être, meurtrière pulsion. « Voyez-vous ça… L’agneau serait-il un loup qui s’ignore ? » « Contente toi de me donner un nom, espèce de connard. » « Le langage, mademoiselle Lovegood ! Ne jurez pas pour rien ! » Elle prit une profonde inspiration, sa patience s’érodant, perdant pied, espérant voir son supplice prendre fin au plus vite. « Voilà qui est mieux… Le savoir ne vous aidera en rien, ma chère… Vous ne pouvez rien contre le mal, lui-même… » Rageusement, elle grogna, donnant un coup sur les barreaux. « DITES-MOI ! » Si Azkaban tout entier n’avait pas entendu ce cri, cette folie meurtrière qui l’animait à cet instant, c’était un véritable miracle. L’autre riait toujours. L’autre se complaisait dans cette ignorance qu’il lui imposait. « Voilà un jeu plaisant… Et pourtant, vous qui répétez son nom à longueur de journée… Ne voyez-vous pas à quel point c’est évident ? » Il s’était déplacé, la rejoignant sur ce mur commun de la cellule pour mieux venir murmurer les derniers mots, comme un secret que l’on délivre. Un frisson glissa le long de son échine, s’arrêtant dans le creux de sa nuque. Et alors qu’elle comprenait peu à peu, le scénario lui semblait irréaliste. Improbable. Le Monstre grandissait dans son esprit tandis que les pensées de la belle murmuraient son nom alors que l’homme à ses côtés ricanait à nouveau. Ulixes Yaxley. A quel point, seulement, devait-elle croire la folie dévorante de son voisin de cage ? Quels arguments étaient les siens ?

Elle ne découvrit son identité que le jour où elle quitta sa cellule. Dans les bras de son aîné, portée pour mieux être transférée dans une prison plus douce alors que son esprit avait cédé, alors que sa conviction avait fléchi face à l’enfer d’Azkaban, la poussant à apposer son nom sur un document d’ores et déjà maudit, il avait vociféré quelques mots, agaçant son frère qui l’avait alors appelé par son propre nom. Yaxley. Son enfer serait donc perpétuellement ce nom que, bientôt, malgré elle, elle devrait porter.
Olivia Lovegood

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