Elle n'a pas voulu ça, Lyssa. Elle ne voulait pas perdre le contrôle, Lestrange. Mais il est des souvenirs qui vous collent à l'épiderme. Il est des événements qui provoquent des réactions incontrôlables. Et en un instant, la tempête était née. L'air s'était soulevé. La température avait chuté. De la surprise dans l'autre regard. Presque de la peur? Elle ne sait pas, Lyssa. Ses yeux sont voilés. Elle n'est plus que la simple spectatrice de sa propre perte de contrôle. Puis, enfin, tout s'arrête.

C'est la voix d'Ashley qui résonne aux oreilles de la Lestrange. Une voix douce aux accents rassurants. Un murmure qui effleure l'air qui l'entoure. Une caresse à distance. Une tendresse infinie dont elle n'a pas l'habitude. Une étoffe qui frôle son corps, et la fait frissonner même à travers ses vêtements. Et ce mouvement contre ses joues. A peine supportable. Et pourtant, la chaleur de la peau n'est pas là. Le contact est indirect. Et cet effleurement est apaisant. Une minute. Juste une minute, et elle sera prête à se lever, Lyssa. Juste une minute pour laisser à son corps le temps de récupérer de cet effort incontrôlé. Juste une minute pour ne pas s'écrouler. Juste une minute pour respirer.  

Elle tressaille Lesath, à la voix cassante d'Ulixes. ❝She’s not ready for the battlefield.❞ Elle le savait. Son dernier éclat l'avait condamnée. Elle serait reléguée aux rebus de l'armée. Ceux qui sont marqués et ne servent à rien. Elle serait la déception de son père. Elle serait le désappointement de sa mère. Elle serait la victime de ces coups, le réceptacle de ces cris. Elle recevrait leur colère. Et il répète sa sentence, le Yaxley. Et elle frissonne de nouveau, Lyssa. Elle anticipe, déjà. Elle sait ce qui l'attend, si elle rentre en déception. Elle imagine déjà la soirée impitoyable qui se dessine devant ses yeux. Sa lèvre tremble. Pitoyable poupée désarticulée.

Non. Non.

Elle se relève, Lyssa. Assise dans l'herbe, le moindre de ses membres tremble encore. Mais elle est prête à se redresser. Elle est prête à recommencer si nécessaire. Pour lui prouver au Yaxley, qu'elle n'est pas une petite chose fragile, qu'elle est capable de se battre, encore et encore. Lui montrer qu'elle se relèvera, qu'elle... ❝She’s not completly useless.❞

Soulagement qui s'insinue dans ses veines. Et son regard qui se dévoile. Elle avait peut-être une chance, Lestrange. ❝She has potential.❞ Elle serre les dents. right... Les horreurs qu'elle est capable de déclencher sont donc assimilées à un potentiel, potentiel létal certainement. Elle le sait déjà, Lyssa. Mais déjà, les réprimandes ne sont plus à l'ordre du jour. Et elle respire, Lestrange. ❝She needs some training.❞ De l'entraînement... Elle reçoit une instruction stricte depuis son plus jeune âge, Lesath. Comme une arme à perfectionner, un petit soldat à modeler à l'image d'une famille meurtrière. Deviendrait-elle le pantin d'un autre? Au fond, peut-être qu'un changement d'instructeur de serait pas quelque chose de mauvais. Peut-être ne serait elle plus l'enfant inutile dans les yeux de son père. Peut-être ne serait elle plus la chose insatisfaisante dans le regard de son père. Peut-être ne serait elle pas l'enfant fragile que voient ses frères. Un regard neuf sur ses capacités. C'est tout ce qu'il lui faut, n'est-ce pas?

Ashley change de sujet, et lui propose de venir boire quelque chose. Elle pose avec délicatesse sa main sur son épaule, sans doute pour l'aider à tenir droite. Et aussi crispant que puisse être son contact, il reste bienvenue. Parce qu'elle finit par se mettre debout, Lestrange, et que ses jambes tremblent encore. ❝do you have chocolate?❞ Elle n'est pas bien assurée sa voix. ❝or anything with lots of sugar... honey in tea would do.❞ Elle ne veut pas se montrer exigeante, Lyssa. C'est juste qu'elle sait. Elle sait qu'elle ne retrouvera pas son état normal avant d'avoir ingurgité autant de sucre que son estomac puisse en contenir. D'ordinaire, c'est son elfe, Lenya qui s'occupe d'elle. Mais la voix féroce d'Ashley qui interdit à Ulixes de s'approcher ressemble à la dureté de la petite elfe quand elle gronde après les enfants Lestrange. Et un sourire imperceptible étire les lèvres de la jeune sorcière. ❝i'm fine. it's fine. i won't break. i won't lose it again.❞ Mais ils ne semblent pas l'entendre, les Yaxley. Et leur petit dialogue continue d'une question de Mrs Yaxley, et d'une acceptation de Mr Yaxley. i'm in! qu'elle pense, Lyssa.

Mais les premiers compliments réels, viennent d'Ashley. Comme si Yaxley avait besoin de quelqu'un pour lui traduire le monde, pour le traduire au monde. ❝You did good.❞ qu'il finit par acquiescer. Et un sourire satisfait étire les lèvres de la Lestrange. Ces trois petits mots lui suffisaient amplement. Puis des encouragements courent sur la langue de la femme de la maison, révélant à la jeune fille sans doute plus que son tout nouveau mentor ne l'apprécierait. Un hochement de tête compréhensif, de la brune. Puis, ❝Would you like to lunch with us, today?❞ Elle se redresse soudainement, et se braque contre son épuisement qui martèle ses muscles. Mais elle se rappelle les bonnes manières qu'on lui a inculquées, incisées jusque au creux de ses os. ❝That's so very kind of you, Missus Yaxley, but i wouldn't want to impose.❞ Mais refuser totalement l'hospitalité, n'est jamais une bonne idée. ❝Tea and biscuits will do.❞ Adresse-t-elle à la maîtresse de maison. ❝And i should probably help you put all of that disaster in order, if you don't mind waiting for me, Mister Yaxley.❞ Elle tente de maintenir son dos droit. Mais n'a qu'une hâte, rejoindre le salon de jardin, et profiter de l'assise confortable d'une chaise en avalant un thé bien chaud et bien sucré.

Ulixes n’avait pas d’appréhension sur ce monde qu’il ne comprenait pas. Lyssa était un soldat en devenir, comme il en était devenu un. Un soldat du maître. À son service. À son entière disposition. Mais Ulixes ne jugeait pas Lyssa pour sa perte de contrôle, pour sa magie déchaînée. C’était juste un fait à traiter. Il ne pouvait pas la laisser partir en bataille étant une bombe à retardement. Il fallait juste trouver le moyen de la désamorcer préventivement.
Simple instructeur et pas juge.  
Il lui reconnaissait à son jeune âge la qualité de l’avoir blessé deux fois. D’avoir fait couler le sang d’un mangemort aguerri au combat. Il la trouvait trop confiante en ses capacités secrètes ceci dit. Mais, cela aussi, s’apprenait. Il voyait surtout la jeune fille à peine majeur, tout fraîchement sortie de Poudlard. La 7ème année n’était pas la fin d’un cycle, mais le début d’un autre. Ce n’était que bien plus tard qu’il l’avait compris. Qu’une fois sortie de l’école, les petits poissons étaient largués dans l’océan.
Il ne la jugeait pas, la petite Lyssa, d’avoir échoué à le terrasser, d’avoir perdu le contrôle, d’avoir été surprise par lui. Personne ne naissait prêt pour la guerre. Même Ulixes pouvait reconnaître cela avec soulagement. Heureusement, la guerre s’apprenait. Il lui reconnaissait surtout la capacité de l’apprendre.

« Of course, sweetheart. » Ashley lui avait tout de suite trouvé un affectueux surnom. Elle bougea sa baguette en direction de la cuisine. Quelques secondes plus tard flottaient vers la table chocolat, miel, sucre, thé, bouilloire fumante, biscuits, tout ce qu’elle avait demandé et plus encore. Aucun elfe de maison n’avait pointé le bout de son nez pour les servir. Le couple n’en avait point. Choix étrange aux yeux des autres sorciers. Ashley n’en avait jamais eu, et Ulixes ne les avait jamais apprécié.

Ashley connaissait par cœur son mari. Plus de dix ans qu’ils vivaient ensemble. Elle connaissait tous ses regards, ses gestes, ses défauts. Ses vertus aussi. Elle avait su le voir, cachées, dissimulées, trop minces et fragiles pour les autres. Inconstantes. Conditionnelles. Ses échecs et ses fautes étaient trop lourdes.
Elle, elle avait eu la chance de le connaître dans sa deuxième décennie. Elle avait eu la chance de le connaître terrassé par l’ennui. Elle l’avait vu, calme et posé, inventer. Des origami en papier voler vers elle.
Elle avait aperçu, au fond de lui, cette magie capable de transfigurer la réalité en tout temps, à toute heure. Elle l’avait vécu, les champs fleurir pour elle. Pour une lueur dans ses beaux yeux, qu’il voulait contempler.
Inexplicablement, il l’aimait. Sans même pouvoir lui dire. Sans même maîtriser le sens de ce mot.
Elle savait. Elle savait qu’il n’en serait pas capable, qu’il ne l’aimerait jamais à la manière des contes de princesse qu’on racontait aux petites filles. Qu’il ne serait pas le prince charmant. Qu’il faudrait lui expliquer le respect le plus élémentaire. Qu’il s’en foutrait pas mal de savoir ce qu’elle appréciait. Qu’il ne retiendrait pas son anniversaire.
Elle devinait cette noirceur qui entourait son âme. Et pourtant, elle l’aimait.
Elle l’aimait parce qu’elle savait qu’il refusait tout contact physique, mais s’était abandonné centimètre par centimètre à elle. Il s’était laissé gagner. Elle l’aimait parce qu’elle avait accepté de ne pas chercher à le changer, elle avait accepté d’anticiper, de lui dire clairement ce qu’elle attendait de lui, sachant que ce n’était pas pour autant garanti. Elle l’aimait parce qu’il avait appris à l’écouter, et à accepter l’impensable. Qu’il étaient deux. Et qu’il devait y penser, de temps en temps. Qu’elle était précieuse, et que la garder impliquait faire des efforts.
Ce n’était pas facile tous les jours. Et elle l’aimait aussi pour ça. Parce qu’elle voyait ses difficultés, et ses tentatives de les surmonter.
Elle avait appris à lâcher prise pour deux. Elle était le rocher imbrisable auquel s’amarrer. Que sa méchanceté ne pouvait broyer. Il avait cédé. Elle était plus forte que lui. Il était plus dépendant d’elle que non elle de lui. Elle l’avait conquis.
C’était peut-être une forme étrange d’amour, mais c’était celle qu’il comprenait.
Elle tirait le meilleur de lui. Remplaçait ce lien qu’il n’était pas capable de créer lui-même avec le monde. Guidait ses mots.

Ashley sourit malicieusement quand la petite Lestrange accepta pour le stricte minimum. Tea and biscuits. Elle perçu une petite ouverture par laquelle se faufiler tel un serpent pour convaincre Lyssa. Tentatrice. Elle finirait par accepter. Il fallait juste la cuisiner un peu. Lyssa n’allait pas beaucoup résister. Elle avait des années d’entraînement avec la tête de mule d’Ulixes. Ce dernier regarda à peine Lyssa du coin de l’œil quand elle s’adressa à lui. N’importe quoi. Elle ne lui semblait pas en état de faire quoi que ce soit. Il se contenta donc de l’ignorer, continuant à remettre à plat les bosses du jardin. Ashley quant à elle pouffa ostensiblement. Sang mêlée. Son éducation n’avait visiblement pas été du tout la même. Tellement plus cash et libre que celle qu’on donnait aux sang-purs.

« Don’t worry, sweetheart. He loves gardening. »

« No, I don’t. » Précisa Ulixes inexpressif, bien plus intéressé par le caillou qui créait une protubérance disgracieuse au milieu de SON terrain. Il le dégagea vite fait vers la forêt, d’un simple geste de baguette.

« He will » Appuya sa femme.

Ulixes roula des yeux. Il savait très bien ce qu’il disait quand même, il connaissait ses propres goûts, et le jardinage ne ferait jamais parti de ces activités préférées. Mais savait très bien qu’Ashley aurait toujours le dernier mot. Puis, il n’avait demandé aucune aide. De quoi elle se mêlait la petite Lestrange ? Ce n’était pas tellement l’activité en soit qu’Ulixes appréciait, mais le fait de la faire tout seul. SA pelouse. A la rigueur, Ashley était autorisée à suggérer des propositions, dont il se réservait le choix d’accepter. La maison, c’était le royaume d’Ashley, mais personne ne touchait à SON jardin.
Ashley sourit. « Come » fit-il a Lyssa « the tea is waiting for us. » Elle l’entraina doucement, la frôlant juste à travers le plaid pour amorcer le mouvement. Elle n’allait pas imposer son contact.
Elle lui proposa de s’installer en face d’elle, rapprocha de Lyssa l’ensemble des choses sur la table pour qu’elle choisisse ce qu’elle souhaitait. Elle piqua un biscuit pour accompagner son thé. « It’s a pleasure to have visitors. Eat and drink as much as you want! »
Ils étaient un couple un peu solitaire. Ashley n’avait plus vraiment de famille vivante. Ulixes n’invitait jamais la sienne.

Elle l’observait toujours du coin de l’œil tout en écoutant Lyssa. Une pierre semblait tester sa patience. Elle se leva. « I’ll be right back » qu’elle laissa flotter dans l’air pour rassurer Lyssa alors qu’elle s’approchait de son mari. Elle annonça sa présence d’une caresse sur le bras. Il lui racontait quelque chose au sujet de la fichue pierre qui lui résistait. Elle tenta de lui caresser le visage, du côté droit. Il l’évita. Elle comprit aussitôt que Lyssa avait réussi à le blesser plus que sérieusement que ne le laissaient paraître les deux petites gouttes de sang qui s’étaient échouées sur sa chemise. Elle négocia, réussi à lui faire fermer les yeux quelques secondes pour pouvoir lancer un episkey sans qu’il ne voit le bout de la baguette pointé sur lui. Elle l’embrassa tendrement. « Better ? »
Il acquiesça. Puis elle lui fit une remarque sur l’aplatissement du terrain qu’il ne sembla pas apprécier. « Go feed baby Lestrange » grommela-t-il vexé. Elle s’en amusa rejoignant Lyssa.
« Well then, he asked me to feed you. He’s the boss now, isn’t he? » Fit-elle tout sourire avec un clin d’œil. Elle avait savamment joué ses cartes, redoutablement placé ses pions.

Quelques minutes après, une fois satisfait du parfait nivellement de la pelouse, Ulixes les rejoints sans rien dire. De nature taciturne et solitaire, il se contenta de prendre son de thé glacé, le but d’une traite et se réfugia à l’intérieur. Sur un côté du salon, une porte vitrée donnait sur le bureau et le coin lecture. Il disparut derrière elle.

Aussitôt sa demande de sucre a-t-elle quitté ses lèvres, que déjà Ashley s’affaire à préparer tout ça de quelques gestes de sa baguette. Les objets s’échappent de leur place à la cuisine, et prennent place à l’extérieur, comme mus par une volonté propre. Lyssa ne commente pas. Ni sur le fait que Mrs Yaxley soit en charge de préparer le thé, ni sur le fait que malgré leur nom et leurs richesses, le couple ne possède pas d’elfe de maison. Elle ne dit rien. Et se contente de prêter l’oreille. L’échange entre les deux époux fait hausser un sourcil parfait et interrogateur à la jeune Lestrange. Puis le roulement des yeux de son évaluateur soudain devenu mentor lui arrachent un petit sourire amusé. Et si elle n’articule pas une syllabe, son regard scrutateur essaye de sonder le mystère de ce couple étrange et dépareillé. Elle n’était pas encore certaine, Lyssa, de comprendre la dynamique qui liait les deux Yaxley, mais elle s’amusait déjà de les découvrir, et se ferait un plaisir de continuer à l’avenir.

Puis c’est à nouveau au tour de la maîtresse de maison de reprendre la parole et d’entraîner la jeune Lestrange vers le salon de jardin, ou un thé complet les attend. La bouilloire laisse échapper un filet de vapeur qui annonce déjà un grand soulagement pour les membres fatigués de Lyssa. Et à côté, chocolat, crème, biscuit, sucre et miel. La perfection les attend. Un goûter saturé en glucose pour réanimer les muscles tendus par les efforts et à moitié paralysés par la fatigue de Lestrange.

Le bout des doigts d’Ashley dans son dos la perturbe, Lyssa. Alors que la pression lui arrache encore un frisson qu’elle tente de réprimer. Alors que sa proximité lui inspire presque un mouvement de recul, il y a l’extrémité de ses doigts délicat. Ce contact est doux, bien plus que ce à quoi elle est habituée. Ce contact est différent de ce qu’elle a l’habitude de recevoir. Ce contact ne ressemble en rien à celui que lui impose sa propre mère. Et tout le long du court chemin qui les mène à la table dressée, Lyssa est encore partagée entre l’envie de sentir ces doigts dans son dos et l’irrépressible besoin de les repousser.
Finalement, les voilà parvenues à leur destination, et Lyssa n’a rien dit. Et Lyssa s’assied sans un mot. ❝It’s a pleasure to have visitors. Eat and drink as much as you want!❞ Un sourire poli mais sincère étire les lèvres rouges de Lestrange. ❝It’s a pleasure to share your table. thanks you, Missus Yaxley.❞ Elle ne dit pas grand chose d’autre Lyssa, et se contente de pointer la bouilloire d’un geste nonchalant de sa main gauche. Elle est fatiguée, mais il y a certains gestes qu’elle est trop habituée à effectuer. Des gestes qu’elle effectue machinalement sans vraiment y penser. Le contenant se lève de lui-même et vient servir avec précision la parfaite dose d’eau fumante dans la tasse de la jeune fille. Et alors qu’Ashley s’éloigne pour rejoindre son époux, Lyssa se laisse aller contre le dossier de sa chaise, ajoutant sans compter crème et miel dans sa tasse brûlante, après y avoir ajouté une boule à thé. Son attention est bien plus focalisée sur ce qui se passe à table que sur les deux époux qui murmurent dans leur coin.

Puis, un biscuit dans une main, sa tasse dans l’autre, alors qu’elle sent la température du thé se répandre peu à peu dans son corps et détendre ses membres, elle laisse son regard flâner jusqu’à ce qu’il se pose sur le couple qui discute à voix basse. Regard qu’elle détourne aussitôt que leurs visages s’approchent. Parce que Lyssa est pudique. Parce qu’elle est éduquée de telle manière que des scènes d’ordre privées doivent le rester. Parce que soudainement, le fond de sa tasse de thé est très intéressant. Puis après quelques murmures supplémentaires, et quelques gorgées de thé avalées, les oreilles indiscrètes de Lestrange surprennent une nouvelle phrase. ❝Go feed baby Lestrange.❞ Elle se redresse aussitôt, Lyssa, alerte. Et lance à haute voix en direction de Mister Yaxley avec toute l’indignation dont elle est encore capable : ❝I heard, that, you know!❞ Puis ajustant le volume de sa propre voix, elle ajoute comme pour elle-même. ❝and i am no baby.❞ Ce surnom, elle l’entend déjà suffisamment. Elle est la dernière d’une fratrie de frère tous bien plus âgés. Elle est la petite dernière, le petit trésor des aînés, la pauvre petite fille fragile à préserver et protéger. Elle est la petite, le bébé. Mais que tous se détrompent, le bébé a bien grandit, et la jeune femme assise avec droiture sur sa chaise de jardin est loin d’être une enfant désormais.

Mais déjà Ashley revient vers elle, et Lyssa lisse l’air renfrogné qui s’était emparé de son visage. ❝Well then, he asked me to feed you. He’s the boss now, isn’t he?❞ Un regard d’incompréhension se peint sur les traits de Lestrange. ❝well isn’t that what you’re already doing?❞ demande-t-elle en désignant l’assiette de biscuits et le thé devant elle, suivant du regard un Ulixes renfrogné et muet, enfiler un verre de thé glacé et passer du jardin au salon avant de disparaître derrière une autre porte.

La jeune Lestrange désigne la porte d’un geste du menton. ❝he doesn’t talk that much, does he?❞ Elle laisse à peine une soupir, pas assez pour laisser à Ashley le temps de répondre avant de reprendre. ❝Please don’t be offended by my question, but… you’re not pureblooded, are you?❞ Et avant que ne s’installe un malaise entre les deux femmes rassemblées autour d’un thé, Lyssa s’empresse de préciser,. ❝I don’t mind, really. I’m just... curious.❞ avant d’expliquer d’où vient la question qui s’est extirpée d’entre ses lèvres. ❝I don’t know your face, and I’ve studied wizarding genealogy since I was a kid. And I’m kind of surprised. with his name, a half-blood spouse isn’t really what comes to mind.❞

Qu’est-ce que ça pouvait bien lui faire qu’elle l’entende? Il n’avait toujours pas digéré le surnom « Gorgeous » dont elle l’avait si gentiment affublé pendant leur duel. Une attention dont il se serait bien passé. C’était donc de bonne guerre que de la traiter de bébé.

Ashley revient vers leur invitée pour lui annoncer la bonne nouvelle, elle allait pratiquement la gaver. « Hmm, can we consider the tea as a meal ? » se questionna-t-elle sincèrement. Visiblement le foyer Yaxley vivait au rythme d’un appétit un peu plus important que celui de la jeune Lestrange. Elle n’avait pas l’habitude, Ashley, de nourrir des oisillons. « Besides, you have to recover your strengh, don’t you ? » fit-elle avec un clin d’oeil. “ Nothing better than a chicken pie, believe me. ” Son enthousiasme était Presque contagieux.

Ulixes passa, en coup de vent. Ashley le laissa faire. L’attitude renfrognée de son mari ne semblait pas la gêner. Elle rit plutôt à la remarque de Lyssa. « Indeed, he doesn’t. »
Ashley l’avait connu ainsi. Taciturne. Bavard en silences. Loquace dans son mutisme. C’était difficile à expliquer. Elle avait appris à transcrire ses gestes, ses regards plutôt que des mots qui s’étoufferaient fatalement dans son larynx. Talk n’était pas l’expression qu’Ashley aurait choisi. Cela n’empêchait pas Ulixes de s’exprimer. Autrement.
Ulixes avait l’impression d’être mal habile avec les mots. Ses adelphes étaient bien plus rompu à cet exercice. Le verbe lui échappait parfois. Ce n’était jamais évident de se rendre intelligible au monde. Ce monde si complexe, trop. Toutes ces subtilités qui lui échappaient chez ses pairs. Il s’isola dans le bureau afin de continuer avec ses obligations de la journée, dont le rapport sur le test qu’il venait de faire passer à la plus jeune des Lestrange.

La conversation continua pour Ashley. Entre deux gorgées de thé, Lyssa la questionna sur ses origines. La jeune femme prit des pincettes pour évoquer un sujet délicat. Ashley sourit, poliment, tristement aussi. Mais ce n’était pas à cause de la demande de la jeune sorcière. « I’m not offended, sweetheart. It’s true, I’m half-blood from generations. I don't have an august birth. My maiden name was Saint-Clair, nothing illustrious.” Elle fit mine de réflechir “ Maybe one of my great-grand-mothers was a Prince, but I don’t even remember of which side, if from my mother or my father.” Elle but une autre gorgée de son thé. “ Well, his family never really accepted our wedding. Ulixes imposed himself more than once. Actually, I met him when we were working for the same service. We worked at the disinformation department. But I know that before that he was an obliviator. He was so handsome.” Elle ricana. “ So silent and mysterious. He sent me the documents turned into a paper bird. He was just too lazy to move, but, I felt that was so creative and sweet. Yeah, I fell for him really quickly. I asked him to date. And we date. And he wanted to marry. And I accepted.” Elle joua avec sa bague de fiançailles tandis qu’un doux sourire se dessina sur ses lèvres. Quatre minuscules émeraudes incrustées dans un minuscule anneau d’argent, une bague plutôt pauvre. « He bought it against his father's will. On his own savings. Even his mother didn’t agree to help him. He scared me. At that time, I had started thinking he was seeing another woman.” Elle riait joyeusement. C’était désormais derrière elle, c’était les souvenirs d’une décennie passée, d’un temps avant la guerre, presque une autre vie et elle regardait le passé avec humour. « But he was only working overtime to buy it. He can be so sweet. We did nothing in the right order. We met, we dated, we lived together far before to engage. He was living in a shabby flat. He was lucky to find me.” Ashley racontait un temps révolu, presque improbable où l’un des noms les plus redoutables de la guerre n’était pas encore connu pour ses faits et gestes, mais simplement comme un simple membre d’une illustre et pure lignée. Et pourtant, même avant sa sortie de Poudlard, ce membre était rebelle. Il avait été presque mis à la porte par ses parents, il avait accepté les emplois les plus minables pour s’extirper de ces disputes incessantes avec son paternel. « He did not pass his NEWTs » explica Ashley. C’était hilarant. Ses capacités n’étaient plus à prouver. Personne n’oserait les mettre en doute. « His father was furious with him long before we met. He was already living on his own for few years.”

« His family compensated well with his brother’s wedding, anyway. And time helped to appease everything. But I’m not surprised to not appear in any genealogy’s book. »

Il s’était marié par amour. Lui qui se taisait. Lui qui n’était probablement pas capable de comprendre ce sentiment. Ils s’étaient marié par amour. Elle qui l’aimait pour ce choix. Quelque chose de rare et d’improbable dans le monde codifié des sang-purs où chacun avait une place prédéfinie de laquelle il ne devait pas dépasser, une symphonie imposée à jouer. Ulixes avait défié toutes les obligations, brisés tous les interdits. Il s’était opposé à tous les dieux que vénéraient ces vieilles familles, même avant de comprendre à quoi il s’opposait. Il aspirait désespérément, avec une ambition folle à faire les choix qui signifiaient pour lui. Une liberté interdite. Il l’avait grappillé toute sa vie. Dressé envers et contre-tout. Nulle tempête pouvait le faire sombrer. Après chaque naufrage, il reprenait la mer. Digne. Combatif. Il était l’Ulysse que Poséidon ne pouvait engloutir.  
Le choixpeau ne s’était pas trompé quand il avait annoncé serpentard. Il était ambitieux à en crever. Simplement ce qu’il cherchait à atteindre n’était pas ce que les autres espéraient. Et il avait la force d’abattre tous les obstacles sur son chemin, il avait la force de caractère d’imposer sa volonté.  
Ils avaient tout construit à deux. Au cours de la guerre. Année après année. Et la fierté qu’ils en tiraient semblait inébranlable. Promesse d’un amour qui durerait toute leur vie.

« You have may notice dit, but we also don’t have any domestic elf. I grew up without any, and Ulixes don’t like them. I know that we look a little bit crazy.”

Différents. Peut-être même fous. Dénués des préjugés habituels certainement. Ulixes ne semblait nullement être gêné par le sang qui coulait dans les veines de sa femme. Il ne semblait pas non plus se plier aux idées véhiculés par la pureté de son sang à lui. Plus que le sang, c’était les nés-moldus, le fait de ne pas grandir sorcier qui gênait Ulixes. Mais malgré cette légère variation, il suivait la voix du Seigneur des Ténèbres avec conviction. Cependant, autant qu’il avait vu Ashley, la femme, sa partenaire, sa femme, derrière toutes les étiquettes et préjugés qui rebutaient sa famille, peut-être serait-il capable de voir Lyssa, la sorcière, derrière le masque Lestrange.

« You’re incredible, Lyssa. » Ashley l’admirait sincèrement. Pour sa puissance magique, pour sa capacité rare à utiliser la magie sans baguette, pour avoir réussi à mettre en échec son mari, pour son jeune âge. « When the war will be over, what do you want to be ? There is any boy you like? ” lança-t-elle sur un ton léger, enfouissant son sourire dans sa tasse. Elle ne souhaitait pas se moquer, mais savait que ce genre de questions simples et banales décontenançaient étrangement les sang-purs et cela l’amusait toujours.  

Ashley parlait d’espoir. D’un lendemain où elle ne serait plus soldate. Était-ce encore possible d’imaginer un futur loin des combats ?